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Les villes où j’ai vécu : St-Hyacinthe

(Depuis sa naissance, Alain a habité dans une dizaine de villes différentes, dont certaines à plus d’une reprise. Bien sûr, ses souvenirs et ses impressions de chacun de ces endroits ont relatives à l’âge qu’il avait à l’époque et aux activités auxquelles il s’était livré…ainsi ue des souvenirs qu’il en a gardés. Voici donc le deuxième billet de cette série. Vous les retrouverez dans l’onglet « Les villes où j’ai vécu » sous les «Grands thèmes » de mon blogue. Bonne lecture.)

par Alain Guilbert

Après ma ville natale, Acton Vale, la première ville où j’ai habité est St-Hyacinthe, qu’on appelait à l’époque (et encore aujourd’hui) « St-Hyacinthe la jolie ». Je ne suis pas vraiment déménagé à St-Hyacinthe… j’ai plutôt fait mon entrée au Séminaire de
St-Hyacinthe pour y entreprendre mes études classiques. Les Cégeps n’existaient pas encore. À cette époque (1951), on terminait ses études primaires (7e année), puis on entreprenait des études classiques… ou on poursuivait jusqu’en 9eannée, et on se dirigeait vers l’usine ou un autre travail.

Comme je l’ai dit dans un texte précédent, nous étions pauvres, et ma mère n’avait certainement pas les moyens d’acquitter les frais de ma pension à St-Hyacinthe, quelque chose comme 36 $ par mois, logé et nourri, enseignement inclus. C’est le curé de la paroisse à Acton Vale, en espérant qu’un jour je devienne prêtre (!!!), qui a payé une partie des frais au Séminaire.

Le Séminaire de St-Hyacinthe accueillait 600 étudiants – tous des garçons –
450 pensionnaires qui habitaient sur place et 150 externes qui logeaient chez eux,
à St-Hyacinthe même) à partir de la classe des Éléments latins jusqu’à la 2e année de philosophie, soit un cours qui s’étendait en principe sur huit années. Je dis « en principe » parce que certains élèves pouvaient terminer le cours en sept années alors qu’on condensait les trois premières années en deux, soit les Éléments Latins, la Syntaxe et la Méthode qui étaient condensées en Syntaxe spéciale et Méthode spéciale. Par la suite, c’était le même parcours pour tous, soit la Versification, les Belles-lettres, la Rhétorique, la Philosophie I et la Philosophie II. Après les deux premiers mois en Éléments latins, on choisissait ceux qui passeraient directement en Syntaxe spéciale. Les autorités du séminaire hésitaient à me faire accéder à ce parcours abrégé à cause de mon jeune âge
(11 ans seulement), mais un professeur originaire d’Acton Vale, l’abbé André Beaugrand, est intervenu en ma faveur en plaidant que si j’étais plus jeune que les autres, c’est tout simplement parce que j’avais entrepris mes études primaires à cinq ans et que j’étais passé directement de la 4e à la 6e année, et que je n’avais pas à être pénalisé pour cela. Des
28 élèves qui ont été choisis pour la Syntaxe, nous sommes seulement cinq à avoir gradué en Philosophie II sans avoir abandonné les cours ou sans avoir doublé une année.

Je me souviens très bien de ma première journée au séminaire. C’était la première fois que je quittais la maison familiale (excepté pour un camp scout) en sachant que je n’y reviendrais pas avant Noël, sauf une journée en octobre et en novembre. Quand ma mère a quitté l’endroit en fin d’après-midi, j’avais le cœur gros, mais comme nous étions de nombreux nouveaux, je me suis rapidement fait des amis. Mais quand venu le temps d’aller au lit (à 21 heures… ce qui était bien plus tôt qu’à la maison) et que je me suis retrouvé dans un immense dortoir de 150 lits (le séminaire comptait trois de ces dortoirs) où nous n’avions pas le droit de parler, je me suis mis à pleurer dès que les lumières se sont éteintes. À en juger par les bruits que j’entendais autour de moi, je n’étais pas le seul. Je me suis finalement endormi, et le lendemain matin, je me sentais beaucoup mieux… et je n’ai plus jamais pleuré d’ennui par la suite.

Ma présente série de textes s’intitule « les villes où j’ai vécu », mais je dois bien avouer que mon séjour de sept années à St-Hyacinthe (j’y suis retourné plusieurs années plus tard… et j’en parlerai dans un futur texte) s’est déroulé à 98 ou 99 pour cent à l’intérieur des limites du séminaire. Nous avions rarement l’occasion d’aller « en ville ». Pour ce faire, il fallait demander la permission au directeur des études et avoir une très bonne raison pour quitter le séminaire, comme par exemple aller chez le médecin ou chez le dentiste. Pour quitter le séminaire, il fallait un billet signé de la main du directeur, billet qu’il fallait présenter à un surveillant au départ ainsi qu’au retour. Une fois par année, nous pouvions nous rendre au manège militaire de la ville où se tenait une clinique de sang de la Croix-Rouge. Nombreux étaient les étudiants qui se portaient volontaires pour donner de leur sang, mais ce n’était pas toujours par pur désintéressement. En effet, c’était une occasion de quitter le séminaire pour aller « en ville », et, petit bonus, la Croix-Rouge donnait un verre de cognac à tous ses donneurs pour les aider à se remettre rapidement sur pied, une pratique fort agréable qui a depuis bien longtemps été remplacée par un simple café.

Au Séminaire de St-Hyacinthe, il y avait des cours tous les jours, y inclus le samedi. Nos congés hebdomadaires étaient les mardis et les jeudis en après-midi, de même que les dimanches. Nous profitions des récréations et des périodes de congés pour faire du sport. Il faut dire que nous étions choyés en termes de terrains et d’équipements : nous avions huit courts de tennis (un réservé à chaque classe), huit courts de balle au mur, huit terrains de softball, trois terrains de baseball, trois terrains de football, une piste d’athlétisme, trois patinoires, un plateau de basketball intérieur (gymnase) et un autre à l’extérieur, huit tables de ping-pong, etc. Le sport était bien organisé : il y avait des ligues de softball, baseball, basketball, et hockey. L’hiver, les mardis et les jeudis après-midi, en plus de matches de hockey disputés sur les trois patinoires du séminaire, il y en avait également à l’aréna de la ville, donc d’autres occasions de quitter le séminaire pour aller « en ville ».

À l’époque des séries mondiales de baseball, il nous arrivait de quitter le séminaire « en cachette » pour aller voir les matches à la télévision. Je me souviens d’une fois où je me suis fait « attraper » et d’avoir reçu tout un « savon » de la part du directeur. Il m’avait dit que j’aurais dû demander la permission, qu’il me l’aurait accordée, ce dont je doute fortement. Mais ses paroles n’étaient pas tombées dans l’oreille d’un sourd. L’année suivante, je suis allé le voir et je lui ai demandé la permission pour aller «en ville ». Bien sûr, il m’a demandé « pourquoi? » et je lui ai avoué candidement que c’était pour aller voir la Série mondiale chez un confrère dont les parents habitaient St-Hyacinthe. Il m’a d’abord refusé… mais quand je lui ai rappelé son petit discours de l’année précédente à l’effet que
« si j’avais demandé la permission il me l’aurait accordée »… il a été pris à son propre piège et m’a autorisé à y aller. J’en ris encore quand je pense à ce coup fumant.

Pendant mes sept années au séminaire, j’ai pratiqué tous les sports possibles. Je n’excellais dans aucun, mais je me débrouillais dans toutes les activités. Je n’ai jamais été assez bon pour faire partie de la première équipe de ma classe, mais je faisais toujours partie de la deuxième équipe. Quand il n’y avait pas de longs congés, comme à Noël et à Pâques, nous avions droit à un congé par mois pour aller dans nos familles… à condition d’avoir de bonnes notes de conduite. Il faut dire que parler dans les moments de silence pouvait facilement nous valoir une mauvaise note de conduite. Et des moments de silence, il y en avait beaucoup. Inutile de dire que j’avais de nombreuses difficultés de ce côté-là… ce qui fait que je perdais souvent mes congés du mois. Ceux qui avaient leur congé du mois partaient en autobus vers 8 heures le matin, immédiatement après le petit déjeuner, pour se rendre dans leurs familles respectives, et ils devaient revenir au séminaire pour
8 heures le soir. Ceux qui n’avaient pas leur congé et ceux qui habitaient trop loin pour effectuer un aller-retour à la maison le même jour devaient rester au séminaire, mais ils étaient libres toute la journée… pas de cours, pas de session d’études… seulement des sports durant 12 heures, sauf de brèves pauses pour le dîner et le souper. J’adorais ne pas avoir mes congés du mois!!! Il y avait plusieurs élèves franco-américains au séminaire. Ils venaient des états américains voisins du Canada. Évidemment, ils n’allaient pas à la maison pour un congé d’un jour. Ils connaissaient et pratiquaient tous le football et nous l’ont enseigné. C’est comme cela que j’ai appris le football américain (que j’adore toujours) bien avant d’apprendre le football canadien.

Au séminaire, j’ai continué à développer le goût de la lecture. Il y avait tellement de moments de silence… dont je profitais pour lire. Je lisais en défilant dans les interminables corridors, je lisais pendant la messe quotidienne en dissimulant mon livre dans un étui de missel, je lisais dans la salle d’étude dès que j’avais terminé mes devoirs (ce qui ne me prenait habituellement pas beaucoup de temps), je lisais dans mon lit en attendant qu’on ferme les lumières du dortoir. Je crois avoir lu en moyenne un livre à tous les jours où j’ai été au séminaire. Nous avions une bibliothèque dont j’ai rapidement fait le tour. C’est alors que j’ai découvert que plusieurs professeurs avaient des bibliothèques personnelles intéressantes. Je n’ai pas hésité à me faire « copain » avec eux et à leur emprunter des livres. Ma mère m’avait enseigné le respect des livres… et je leur ai toujours fait attention et les ai toujours remis dans le même état où ils étaient quand je les ai empruntés. J’étais passionné par les romanciers du XXesiècle, les Mauriac, Balzac, Zola, Camus, St-Exupéry, Hemingway, Steinbeck, et combien d’autres. Durant mes années de Philosophie, nous avions des cours de littérature, particulièrement de littérature contemporaine. Il ne m’est jamais arrivé que le professeur nous parle d’un auteur dont je n’avais pas lu la majorité des œuvres.

Ces sept années au Séminaire de St-Hyacinthe ont été merveilleuses. J’y suis arrivé un enfant… j’en suis sorti un adulte… ou presque.

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Le rêve d’un parc comme tremplin économique

Dans Le Carillon du 2 mars 1967, un long article indiquant que « Le Parc Dollard-des-Ormeaux sera un tremplin économique ». C’est un représentant d’Hydro-Québec qui avait été conférencier à la Chambre de commerce de Hawkesbury. Paul Talbot expliquait les grandes lignes d’un projet grandiose d’aménagement d’un parc qui s’étendrait du barrage hydroélectrique de Carillon, à l’est, jusqu’à Pointe-Gatineau, à l’ouest, en passant bien sûr par ce qui allait devenir la réserve faunique de Plaisance.

Il s’agissait d’un projet d’Hydro-Québec dans le cadre du centenaire de la Confédération canadienne (nous sommes en 1967 ne l’oublions pas). Il avait insisté sur l’importance de ce projet comme tremplin économique. « M. Talbot a précisé que les statistiques prophétisent que la population encerclant le Parc dans les années 1985 atteindra les cinq millions ». Cinq millions d’habitants en Outaouais! Le temps, bien sûr, a démontré que rien de tout ça ne s’est matérialisé, sauf le petit parc à Carillon et la réserve faunique à Plaisance.

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Signe des temps. Dans Le Carillon de l’époque, les femmes sont toujours identifiées par le prénom et le nom de famille de leur mari avec l’indication « née xxx » entre parenthèses. Par exemple, Mme André Landry (née Suzanne Danis). Je les nomme parce que c’était des amis à l’époque et que j’ai perdus de vue. C’était il y a 45 ans. Heureusement, les temps ont changé. Au Québec, les femmes ont le droit et l’obligation de conserver leurs noms depuis longtemps.

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Publicité dans l’édition du 9 mars : Michel Charbonneau, qui est aujourd’hui juge à la Cour provinciale, est le metteur en scène de la pièce Le Malade imaginaire que présentera le théâtre L’Onyx à la salle du Christ-Roi. C’était bien avant le Cercle Gascon et le Cercle Gascon II. Michel était aussi le responsable « jeunesse » au sein de la St-Jean-Baptiste locale.

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Vous avec forcément attendu parler des gaz de schiste et des plaintes de nombreux Québécois à cet effet. À la une du journal Le Carillon du 16 mars 1967, une photo de la compagnie Consumer’s Gas, de Welland (Ontario), qui effectue des opérations de forage sur la ferme de feu D.C. McCrimmon, près du petit hameau qui porte son nom (McCrimmon’s Corner) au nord d’Alexandria. On y cherche de l’huile ou du gaz. Ce fut bien sûr une perte de temps. Personne n’avait critiqué l’opération dans les journaux de l’époque.

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St-Isidore aurait pu être anéantie

L’année 1967 n’est pas trop fertile en nouvelles importantes ou intéressantes dans les premières éditions du journal Le Carillon. Celles-ci comportent surtout des photos sur les carnavals de la région, les diverses nominations habituelles de début d’année et des thèmes plutôt ordinaires. C’était comme ça chaque début d’année.

Il faut attendre l’édition du 16 février 1967 pour trouver quelque chose d’intéressant. Un titre clame que : « Si le vent avait soufflé en sens inverse… Le village de St-Isidore-de-Prescott aurait pu être anéanti au complet ». L’article se référait bien sûr à l’incendie majeur qui avait détruit la meunerie de Maurice Lamoureux et la manufacture de portes et fenêtres de Roger Ménard. Le feu aurait pris naissance dans la partie supérieure de l’élévateur à grains de M. Lamoureux par suite de la surchauffe d’une courroie. Une centaine de pompiers volontaires avaient combattu les flammes pendant presque toute la journée de ce samedi 11 février. Les dommages étaient supérieurs à 275 000 $, ce qui était énorme pour l’époque. Heureusement, les deux proprios ont pu sauver leurs papiers importants et dans le cas de Roger Ménard, son coffre-fort. Les 25 employés de la meunerie et la quarantaine de chez Ménard étaient de retour au travail le lundi suivant, les deux ayant pu reloger leurs opérations très rapidement.

« Ironie du sort, lit-on en encadré, les pompiers volontaires de St-Isidore avaient reçu un nouveau camion-pompe vendredi et avaient rempli d’eau le réservoir de 700 gallons samedi matin, quelques heures seulement avant le début de l’incendie. (…) Les volontaires n’avaient pas encore eu la chance d’essayer le camion. » Ce dut être un sacré bon exercice!

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Dans cette édition du 16 février, en référence au Conseil des comtés unis de Prescott et Russell, on peut lire et entrefilet : « Le Comité sur la vente et la promotion du livre Histoire des comtés unis de Prescott et Russell, rédigé par Lucien Brault, suggère que l’on étudie la possibilité de donner le livre en question à des élèves de huitième année (ou sept et huit) puisqu’il s’est avéré presque impossible de se débarrasser (c’est le mot utilisé)des éditions nombreuses par la vente. » Dans une édition subséquente, sans doute en réaction à des commentaires défavorables, cette décision avait été positionnée comme étant un « projet du Centenaire ». Il n’en reste pas moins que quelqu’un avait tout simplement commandé beaucoup trop d’exemplaires de ce livre de Lucien Brault.

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Vous aurez compris que l’abondance des bureaux de poste est quelque chose que je déplore. Déformation professionnelle de mon long passage à Postes Canada. Quoi qu’il en soit, toujours dans l’édition du 16 février 1967, le ministre fédéral des Travaux publics annonce qu’un bureau de poste sera construit à St-Isidore. L’entrepreneur A. Séguin, de St-Eugène, le construira au coût de 24 935 $. Il n’y a pourtant pas d’élection fédérale en perspective… mais vaut mieux se préparer, j’imagine. Et le nom du député Viateur Éthier n’est pas dans l’article, ce qui est plutôt surprenant. Le bureau de poste est toujours là; comme tous les autres construits à l’époque…, moratoire libéral/conservateur oblige!

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Une garderie voit le jour à Hawkesbury

Dans l’édition du journal Le Carillon du 29 décembre 1966, on nous apprend que le Conseil municipal a adopté un règlement créant l’École prématernelle de Hawkesbury Nursery School. C’était une décision avant-garde. Un groupe de femmes influentes de la ville militait depuis quelque temps pour doter la ville d’une structure de garderie municipale.

La garderie était « fondée pour les parents (pères ou mères) qui doivent s’absenter le jour à cause du travail obligatoire pour vivre ». Est-ce possible que l’on écrivait ainsi? La garderie est destinée aux enfants des contribuables de Hawkesbury, mais si l’espace le permet, les enfants de l’extérieur pourront la fréquenter moyennant des frais de « 30,00 $ mensuellement ». Près de 80 p. cent des frais d’exploitation seront défrayés par des subventions provinciales. La première garderie prématernelle allait s’installer dans un local de la rue Principale, en face du presbytère de la paroisse St-Alphonse. Sa première « directrice » serait Jacqueline Lafrenière. Plus tard, la prématernelle s’est installée dans le nouvel hôtel de ville, sous la bibliothèque municipale. Mes deux enfants l’ont fréquentée. Elle existe toujours et porte aujourd’hui le nom de « Garderie Centre éducatif soleil des petits Jacqueline Lafrenière »… comme il se doit.

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Une pleine page en cette fin décembre pour annoncer le « Concours premier bébé 1967 ». Il me semble qu’il aurait fallu publiciser ce concours au mois de mars ou à la St-Valentin, pour que les parents se préparent, non?

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En cette fin de 1966, il y avait encore quatre cinémas dans la région : le Régent de Hawkesbury, le Laurentien de Grenville, le Cartier de Rockland et le Cinéma Lachute. L’Ottawan avait fermé ses portes à Hawkesbury il y a quelques années. Ce dernier cinéma me rappelle un souvenir : le clown Clarabell, de la populaire émission The Howdy Dowdy Show, avait été de passage pour rencontrer les enfants. Ce clown ne « parlait » qu’à l’aide d’un petit klaxon.

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Les villes où j’ai vécu : Acton Vale

(Depuis sa naissance, Alain a habité dans une dizaine de villes différentes, dont certaines à plus d’une reprise. Bien sûr, ses souvenirs et ses impressions de chacun de ces endroits où il a vécu sont relatives à l’âge qu’il avait à l’époque et aux activités auxquelles il s’était livré… ainsi que des souvenirs qu’il en a gardés. Voici donc le premier article de cette série. Vous les retrouverez par la suite dans l’onglet « Les villes où j’ai vécu » sous les «Grands thèmes » de mon blogue. Bonne lecture.)

par Alain Guilbert

Je suis né à Acton Vale le 6 mars 1940, fils aîné de Roland Guilbert et de Léa Loignon. Acton Vale, « la porte des Cantons-de-l’Est », selon ce qui était écrit sur un panneau publicitaire placé près de la voie ferrée en plein centre-ville. Acton Vale, une ville industrielle comptant environ 5 000 âmes, une ville dont les principales industries étaient Acton Rubber (qui n’a pas un jour porté des caoutchoucs ou des bottes Acton?), Acton Shoe, un manufacturier de souliers qui a fermé ses portes il y a bien longtemps, et aussi les Tapis Peerless, dont les produits étaient distribués et vendus partout au Canada. Acton Vale (pour ceux et celles qui n’en ont jamais entendu parler) est située à peu près à la même distance et au milieu de villes comme St-Hyacinthe, Granby, Drummondville et Richmond, quelque part au Centre du Québec, entre la Montérégie et les Cantons-de-l’Est.

Pourquoi Acton Vale? Parce que mon grand-père maternel, Thomas Loignon, qui avait vécu à Thetford Mines jusqu’au milieu des années 1930, avait acheté un hôtel, Le Manoir, et qu’il y avait amené ses trois filles, dont ma mère, pour lui donner un coup de main.
Et c’est ainsi que ma mère a rencontré un bel électricien œuvrant à la Southern Canada Power (mais oui, c’était bien avant la nationalisation des compagnies électriques et la création d’Hydro Québec), qu’elle a épousé en septembre 1938. Tous deux étaient âgés de 33 ans. De cette union sont nés trois enfants, moi, évidemment, et mes frères, Bruno et Laval. Nous aurions possiblement été plus nombreux si un terrible cancer n’avait pas emporté mon père à l’âge de 38 ans alors que je n’avais que 4 ans et que mes frères étaient respectivement âgés de 2 ans et demi ainsi que d’un an.

Ma mère ne s’est jamais remariée, ayant fait le choix de se consacrer à ses « trois trésors », comme elle nous appelait. La vie n’était pas facile à l’époque. Mon père a été alité pendant neuf mois, dont les quatre premiers à l’hôpital St-Charles de St-Hyacinthe et les cinq suivants à la maison, alors qu’on avait jugé son cas incurable. La chimiothérapie et la radiothérapie n’avaient pas encore été inventées. Les programmes comme l’assurance-hospitalisation, l’assurance-santé, l’assurance-médicaments, les CLSC, l’aide à la maison pour les grands malades… rien de cela n’existait à l’époque. Il n’y avait même pas d’assistance sociale pour une « veuve avec trois jeunes enfants » et des dettes d’hôpital, de pharmacie et d’infirmerie.

Avant d’être condamné à garder le lit, mon père qui luttait déjà contre le cancer, avait dû abandonner son emploi comme électricien et s’était trouvé un travail prétendument plus facile en devenant le gérant d’une succursale de meubles Légaré. Au décès de mon père, ma mère a conservé cette agence pour assurer notre survie et la sienne, bien sûr. Elle était alors la seule femme agente de Légaré dans tout le Canada (qui comptait plus de
75 succursales). Quand j’étais tout jeune, je croyais naïvement qu’il s’agissait vraiment d’un magasin de meubles. Mais plus tard, j’ai réalisé qu’il s’agissait bien davantage d’une sorte d’agence de crédit, dont l’objectif était de vendre des meubles « pas trop chers », mais de faire en sorte que les acheteurs les paient à crédit pendant très longtemps. Même si les taux d’intérêt exigés n’étaient pas aussi exorbitants qu’aujourd’hui, ils étaient quand même très élevés. Les gens qui achetaient des meubles dont ils avaient vraiment besoin, mais qui ne pouvaient les payer comptant, se retrouvaient avec des versements hebdomadaires ou mensuels de quelques dollars. On disait ironiquement qu’un acheteur pouvait se procurer un bien de 100 $ en versant 1 $ par semaine… pour le reste de sa vie!!! Quand j’avais 9 ou 10 ans, je faisais parfois de la collection pour les comptes de ma mère. Je me souviens d’une « vieille fille » qui remboursait sa dette à raison de 50 cents par semaine.

Cette période de la vie a été très difficile pour ma mère, parce qu’elle devait consacrer des heures et des heures à ce magasin ouvert de 9 h à 18 h du lundi au jeudi, et de 9 h à 22 h les vendredis et les samedis. Elle en faisait la comptabilité tard le soir, et même une partie de ses nuits, c’est-à-dire quand mes frères et moi dormions.

Nous étions bien jeunes et à l’âge de l’insouciance. Ce n’est que bien des années plus tard que nous avons réalisé toute l’ampleur du travail de notre mère pour s’assurer que nous puissions manger tous les jours et que nous ne nous sentions pas différents de nos « petits amis » et des autres enfants. Nos premières bicyclettes étaient usagées, de même que nos premiers patins. Même chose pour nos premières raquettes de tennis. Lorsqu’il nous fallait des uniformes pour jouer au baseball, ma mère n’avait pas les moyens d’en acheter. Elle les fabriquait. Nous n’avions pas d’argent, mais ma mère en trouvait toujours pour les choses importantes de la vie. À Noël, par exemple, nous recevions toujours des livres en cadeau. Ma mère a tout fait pour nous donner le goût de la lecture. Elle a certainement très réussi avec moi. Elle s’était abonnée à La Tribune de Sherbrooke alors que je n’avais que 7 ou
8 ans. C’est moi qui allais chercher le journal tous les jours au bureau de poste. Je le dévorais du début jusqu’à la fin, avec une attention particulière pour la section des sports. Ce sont probablement les gestes posés par ma mère quand j’étais tout jeune qui m’ont amené à faire carrière comme journaliste et à œuvrer presque toute ma vie dans les médias d’information et les communications.

Il faut dire que j’ai développé le goût de la lecture et de l’écriture très jeune. En effet, j’ai commencé l’école alors que je n’avais que 5 ans. Il n’y avait pas de minimum requis, mais c’était habituellement 6 ans… Les Frères du Sacré-Cœur m’ont accepté à 5 ans pour libérer un peu ma mère aux prises avec trois jeunes enfants depuis le décès de mon père. J’apprenais facilement, et en 4e année, je n’avais pas besoin d’être attentif en classe pour assimiler ce qu’on y enseignait. Le frère Guy-Robert, le titulaire de la classe, me prêtait des livres que je devais lire en classe plutôt que de déranger mes voisins. Je me souviens d’avoir lu le « Tour du monde en 80 jours » de Jules Verne alors que je n’avais que 8 ans.
À la fin de l’année scolaire, on m’a fait « sauter » directement en 6e année parce qu’on estimait que je perdrais mon temps en 5e.

J’ai commencé à pratiquer les sports très jeune: la natation, le tennis et le baseball, l’été; le hockey, l’hiver. Le samedi, nous chaussions nos patins à la maison et marchions, patins au pied, jusqu’à la patinoire de l’école. Nous nous divisions en deux camps… et tout le monde jouait en même temps. Parfois nous étions trois ou quatre dans chaque camp… Parfois
15 ou 20, quand il arrivait de nouveaux joueurs, nous les partagions d’un côté à l’autre. Même chose lorsque des joueurs retournaient à la maison… nous équilibrions les nombres…mais tout le monde se retrouvait en même temps sur la patinoire. Le midi, nous retournions à la maison pour manger. Ma mère plaçait des cartons sur le plancher de la cuisine pour que nous n’ayons pas à enlever nos patins. Et aussitôt le dîner avalé, nous retournions à la patinoire de l’école, toujours avec les patins aux pieds. Lorsqu’il ne faisait pas trop froid, nous retournions parfois à l’école le soir après souper parce qu’il y avait des lumières pour éclairer la patinoire.

Quand la patinoire de l’école n’était pas prête au début de l’hiver ou lorsqu’elle fermait au printemps, nous allions patiner et jouer au hockey sur la rivière. Vous aurez compris que s’il n’y avait pas assez de glace sur la patinoire, il n’y en avait pas davantage sur la rivière. Disons que nous avons souvent terminé nos compétitions au moment où la glace cédait sous le poids de l’un des joueurs (parfois, c’était moi). Nous rentrions alors à la maison trempés jusqu’aux os… ce qui ne nous a jamais empêchés de recommencer, même quand nous savions que la glace était bien mince.

À l’époque, on ne déblayait pas les rues, ni les trottoirs, durant l’hiver. S’il neigeait beaucoup, ce qui arrivait presque toutes les années, les bancs de neige de chaque côté de la rue atteignaient presque les fils des poteaux de téléphone et d’électricité. Nous allions à l’école à pied (les autobus scolaires n’existaient pas encore) et jamais, au grand jamais, une école n’a été fermée à cause d’une tempête. Il ne nous serait jamais venu à l’idée de demeurer à la maison une journée de mauvais temps. Inutile de dire qu’avec les religieux comme enseignants les journées pédagogiques n’existaient pas non plus. Nos professeurs se perfectionnaient les fins de semaine ou durant les vacances d’été.

Le tour de force que ma mère a accompli pendant ma jeunesse, et celle de mes frères, c’est que nous étions pauvres… mais que nous ne nous en sommes jamais aperçus. C’est sûrement là une facette du bonheur!

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Le plus beau mois

Le mois de mai commence dans une dizaine de jours. Voici comment elle le voyait en ce 17 mai 1985. C’est aussi un de ses rares poèmes où les rimes ne suivent pas la même rythme.

Mai, c’est l’éveil vibrant de la nature,
C’est la reprise annuelle de la verdure.
Les arbres se parent de bourgeons fragiles
Et les jeunes poussent s’étirent à vue d’œil
Vers le ciel.
Les pommiers en fleurs offrent aux passants
Leurs bouquets blancs.
La grive siffle d’admiration
Devant la beauté du jour.

En mai, tout est lumière tout est beau,
Les feuilles, l’herbe et même l’air
Tout est nouveau.
On sent déjà une tendre chaleur
Se répandre autour de nous,
Le murmure des ruisseaux et des rivières
Est comme une balade à la terre.

Mai, c’est une nappe toute fleurie
De petites boules jaunes : les pissenlits;
C’est l’éclat d’une touffe de violettes,
Qui sortent de leur cachette.
C’est aussi l’hirondelle dans son nid
Qui nous offre sa charmante compagnie.

Mai, voilà le temps de remercier
Pour tant de choses à admirer.

Pensée que ma mère avait récoltée.

Un éclat de rire, c’est une poussière de joie qui fait éternuer le cœur.

Note du blogueur : Les autres poèmes de ma mère ont des références temporelles inappropriées pour ce temps de l’année. Je les publierai plus tard.

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Les cultivateurs réclament du bilinguisme

Dans l’édition du journal Le Carillon du 8 décembre 1966, un article titre « L’U.C.F.O. réclame du bilinguisme dans la région ». En effet, lors de leur congrès à Rockland, les membres de l’Union des cultivateurs franco-ontariens avaient invoqué « le droit qu’à la cultivateur d’être servi dans sa propre langue, c’est-à-dire que les agronomes, les inspecteurs et tous les autres employés du ministère de l’Agriculture devraient être bilingues, surtout dans les comtés de l’Est de l’Ontario ». Un certain Roger Lalonde, de
St-Pascal-Baylon, affirmait même qu’il « fallait s’infiltrer dans les affaires franco-ontariennes sans être séparatistes ou fanatiques ». Le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN) faisait alors parler de lui au Québec.

* * *

En page 8 du journal Le Carillon du 15 décembre 1966, une nouveauté osée. L’hôtel York de Calumet (je vous avais dit qu’il y avait des hôtels partout) annonce que « Susie jolie danseuse exotique » sera en spectacle les 17 et 18 décembre. Rien de nouveau avec ça, sauf que l’annonce du journal montre Susie… nue… la jambe gauche allongée et la droite pliée au genou… elle n’est couverte que par un long boa de fourrure. Voilà pour l’époque. L’annonce ne dit pas si c’était un cadeau des fêtes de « Pit » Proulx, le proprio du York!

* * *

À la une de l’édition du 29 décembre 1966, un article pour rappeler aux gens de ne pas paniquer autour de minuit le 31 décembre. Les cloches des églises de Hawkesbury sonneront et on entendra une salve de 100 coups de canon. Dix minutes plus tard, le bruit se sera calmé et l’année du centenaire de la Confédération canadienne sera lancée. De nombreuses autres activités se dérouleront tout au long de l’année à Hawkesbury comme partout ailleurs au pays. Le point culminant sera bien sûr l’Expo 67. J’ai encore mon passeport de presse pour l’Expo… un souvenir que je conserve précieusement.

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Le progrès arrive à Alexandria

L’édition du journal Le Carillon du 24 novembre 1966 nous apprend qu’on installera des
« Téléphones à cadran à Glen Robertson et à Alexandria ». Wow! Le progrès arrive.

« Depuis le 12 novembre 1895, les résidents d’Alexandria et de Glen Robertson étaient desservis au moyen du système de téléphone par téléphoniste. Cependant, à compter du 20 novembre dernier, les citoyens de ces mêmes endroits se servent maintenant du téléphone à cadran. (…) Jusqu’à dimanche dernier, une vingtaine de filles et de femmes assuraient le service téléphonique aux quelque 1400 abonnés d’Alexandria et de Glen Robertson. »

Le mot « cellulaire » n’existait pas encore. En peu de temps, les téléphones à cadran allaient apparaître partout dans les régions rurales des villages voisins. La nouvelle me rappelle des souvenirs personnels; la plus jeune sœur de ma mère était responsable d’un groupe de téléphonistes de Bell à Montréal. Elle aussi, éventuellement, allait être victime de la modernisation et allait se transformer en secrétaire (je ne me souviens plus si c’était juridique ou médicale). Elle vit toujours cette tante… avec sa fille en Suisse.

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Un entrefilet banal dans le journal Le Carillon du 1er décembre 1966. Le premier ministre progressiste-conservateur John Robarts venait d’annoncer que le ministre et député du comté de Prescott, Louis-P. Cécile, avait remis sa démission et qu’il ne solliciterait pas un autre mandat lors des prochaines élections en Ontario. Selon la rumeur, il serait nommé juge de la cour provinciale à la fin de son mandat. C’est ce qui se concrétiserait quelques mois plus tard. Âgé de 61 ans, M. Cécile avait été élu en 1948 et était devenu ministre sans portefeuille trois mois après son élection. Peu de temps après, il était nommé ministre du Tourisme et de l’Information et en 1955, il a été nommé ministre du Bien-être.

Ça aussi me rappelle des souvenirs. Son fils, Pierre, était un copain de séminaire. Il arrivait que nous revenions chez nous pour des vacances dans la limousine de son père, conduite par son chauffeur. Lors d’une réception organisée pour souligner le départ à la retraite politique de Louis-P. Cécile, le premier ministre Robarts s’était déplacé à Hawkesbury pour l’occasion. Pierre était là pour son père et moi, comme journaliste. Pierre et moi nous tenions ensemble et, par la force des choses, son père était près de nous. Si bien, qu’à un certain moment, Robarts a entrepris une conversation avec moi. Je dois préciser que j’avais énormément de respect et d’admiration pour cet homme et ce premier ministre. Pendant une conversation entre lui et moi, je lui avais demandé s’il n’en avait pas assez de ces réceptions et d’avoir toujours un verre à la main. Il m’avait répondu – je n’oublierai jamais la réponse – que ce n’était pas un problème parce qu’il ne buvait réellement pas; il portait le verre aux lèvres, mais aucun liquide n’en sortait. J’ai utilisé la technique plus tard à maintes reprises quand mon « devoir » de journaliste devait passer en premier. Tristement, Robarts, plus tard dans sa vie, s’est suicidé peu de temps après avoir appris qu’il était atteint du cancer.

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Une société méconnue… et souvent mal aimée

par Alain Guilbert

Il y a quelques jours, on a célébré un anniversaire qui est probablement passé inaperçu aux yeux d’une majorité de Canadiens. En effet, c’est le 14 avril 1981 (il y a donc 30 ans exactement) que le ministère des Postes du Canada a été transformé en société d’État, soit la Société canadienne des postes, ou plus familièrement Postes Canada.

À l’époque, le changement avait causé de nombreux grincements de dents au sein de la population parce que le prix d’un timbre courant (celui utilisé pour poster une lettre ordinaire) passait instantanément de 17 cents à 30 cents. Depuis des années, le ministère des Postes encaissait des pertes annuelles d’un demi-milliard de dollars ou plus. Le mandat de la nouvelle société d’État consistait à se réorganiser sous le modèle d’une entreprise efficace, d’opérer sans subventions gouvernementales, et idéalement de dégager des profits, de payer des impôts et même de verser un dividende à son actionnaire unique, le gouvernement du Canada.

À cette époque, les relations du travail entre le gouvernement et ses employés du secteur postal étaient au pire. Les grèves s’enchaînaient presque automatiquement tous les deux ou trois ans. Il fallait être visionnaire pour croire que ce secteur pouvait être transformé en une entreprise profitable. L’un de ces visionnaires était André Ouellet, un ex-ministre des Postes qui est devenu le premier ministre responsable de la nouvelle société. À la fin des années 1990, il en est aussi devenu le président du conseil d’administration, puis le président et le chef de la direction.

Trente ans plus tard, on peut dire qu’André Ouellet et ses collègues ont largement gagné leur pari. Dans son rapport annuel de 2009 (le dernier disponible sur son site Internet – le prochain devant être publié dans quelques semaines), Postes Canada déclare un profit pour une quinzième année consécutive malgré un contexte économique difficile. Ses revenus pour cette année-là ont atteint 7,3 milliards $, en baisse de 421 millions $ sur l’année précédente, mais ses dépenses avaient aussi diminué de 639 millions $, ce qui lui a permis de réaliser un bénéfice avant impôts de 379 millions $ et un bénéfice net de 281 millions $. On est bien loin des déficits d’autrefois… et en plus le service postal n’a pas connu de grève depuis bientôt 14 ans.

Pourquoi je vous parle aujourd’hui de Postes Canada? Parce que j’y ai œuvré pendant presque huit années (1997 à 2005) à titre de vice-président, Communications, et parce que j’ai adoré chaque jour (à peu de choses près) où j’y ai été. Dans les années précédant mon entrée au sein de la société d’État, j’avais à plusieurs reprises critiqué ouvertement et publiquement Postes Canada pour toutes sortes de raisons, particulièrement pour la distribution des publications, un secteur auquel j’ai consacré une grande partie de ma carrière. Je dois bien avouer aujourd’hui que mes critiques n’étaient pas toujours bien fondées, pour la bonne et simple raison que je ne connaissais pas très bien Postes Canada.

Ce n’est qu’une fois à l’intérieur de l’entreprise que j’ai appris à vraiment la connaître, et surtout à l’apprécier. Qu’on pense seulement à l’immense défi quotidien que relève Postes Canada, celui de distribuer annuellement près de 11 milliards de pièces de courrier et de colis à pas moins de 15 millions d’adresses résidentielles et commerciales. Et sans oublier que le Canada est le deuxième plus grand pays au monde en surface, que non seulement le courrier doit être livré à Montréal, Toronto et Vancouver, mais aussi à Iqaluit, Fort McMurray, Kujjuak et des milliers d’autres. Dans de nombreux endroits, il n’y a même pas de routes pour s’y rendre. Pourtant, le courrier y arrive régulièrement. Nombreux sont ceux qui disent que la poste est un mode « lent » de distribution, mais elle n’en est pas moins efficace. L’un des objectifs de Postes Canada est de livrer le courrier en deux jours dans la même ville, trois jours dans la même province et quatre jours d’une province à une autre. Cet objectif est atteint régulièrement… et pour l’atteindre, il faut que 80 % du courrier soit livré avec un jour en moins que l’objectif, c’est-à-dire un jour de délai dans la même ville, deux jours dans la même province et trois jours d’une province à l’autre. Mais peu de personnes reconnaissent cette efficacité. Un ami personnel, qui était à l’époque vice-président principal, Opérations, à Postes Canada, m’avait dit que s’il avait à distribuer le courrier en Suisse, par exemple (un pays à peine plus grand que notre main!), il pourrait le faire deux fois par jour avec une main attachée dans le dos. Bien sûr, il ne voulait que souligner l’immensité de notre pays et le peu de densité de population sur plus de 80 % de notre territoire.

Je vous raconte une expérience vécue à plusieurs reprises. Lorsque je travaillais à Postes Canada, j’allais chez le parodontiste toutes les 10 semaines, habituellement le mercredi à l’heure du midi. À la fin de mon traitement, la réceptionniste remplissait mon formulaire d’assurances et le transmettait à la compagnie d’assurances par télécopieur ou par Internet. Le vendredi midi, je recevais mon chèque de remboursement à la maison. Quand je disais cela à un ami, je lui demandais ce que cela signifiait pour lui. On me répondait invariablement que la compagnie d’assurances était « vite sur ses patins ». J’ajoutais alors que oui, la compagnie d’assurances était rapide, mais que Postes Canada l’était également. En supposant que la compagnie d’assurances mettait un jour à conclure la transaction, Postes Canada complétait la livraison en un jour aussi. Mais jamais personne ne m’a mentionné ce côté de la médaille.

Au cours de mes années à Postes Canada, j’ai eu l’occasion, par la nature de mon travail, de voyager à travers tout le pays. Partout, j’ai rencontré des employés de Postes Canada, des facteurs, des employés de centres de traitement, des superviseurs, des gestionnaires, des comptables, des avocats et bien d’autres. Toujours, et cela sans exception, j’ai trouvé parmi eux des personnes extraordinaires, dévouées et engagées à bien servir leurs clients, les citoyens du Canada. Bien sûr, ils ne sont pas tous parfaits. Un certain nombre d’entre eux ne performent pas à la hauteur des attentes, mais il n’y en a plus à Postes Canada qu’il n’y en a dans toutes les autres entreprises, dans tous les autres métiers ou professions.

Il se trouve bien des gens pour penser que Postes Canada serait plus efficace si cette entreprise était privatisée. Ces personnes ne croient pas à l’efficacité de l’entreprise dite
« publique ». Il est possible, voire probable, que l’entreprise privée puisse efficacement distribuer le courrier dans les grandes villes où les adresses à desservir sont nombreuses. Mais cela équivaudrait quasiment à abandonner les citoyens qui vivent dans les villages et les zones rurales. C’est une décision politique qui déterminera l’avenir de Postes Canada… et je doute fort qu’un parti politique ose sacrifier une partie de la population et la priver d’un service qui répond très bien à ses besoins… et qui permet à plus de 70 000 personnes d’y gagner très honorablement leur vie.

Avant de penser à la privatisation, on pourrait encore faire des économies en ne distribuant le courrier qu’aux deux jours aux adresses résidentielles. Personne n’en mourrait… tout comme personne n’en est mort quand on a cessé de distribuer le courrier le samedi au milieu des années 80. (À cause des pressions syndicales, la poste des États-Unis distribue encore le courrier le samedi. Je n’y vois aucun avantage pour les citoyens.) On pourrait également augmenter les boîtes postales communautaires dans les quartiers résidentiels des villes plutôt que de livrer de porte-à-porte. Encore là, on ferait des économies intéressantes sans priver personne d’un service que je considère encore comme essentiel.

Bon 30e anniversaire à Postes Canada… et que cette entreprise « publique » puisse poursuivre son œuvre encore longtemps. C’est une entreprise qu’on aime bien quand on la connaît vraiment!

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Chantons

Ma mère, à la fin de ce poème d’août 1985, écrit que « Chanter, c’est prier deux fois ». Libre à vous de faire les deux! Bien sûr, quand elle écrit que « c’est gratuit », elle a sûrement fait référence à ceux et celles qui ont des arbres fruitiers dans leur cour.

Chantons l’été
Et ses moissons
Tout est gaieté
C’est la saison.

            Chantons les fleurs
            Et les bons fruits
            Aux belles couleurs
            Puis c’est gratuit.

Chantons l’oiseau
Et son langage
Rien n’est si beau
Que son ramage.

            Chantons l’enfant
            Et les sourires
            De sa maman
            Il faut le dire.

Chantons la joie
Qui chaque jour
Peu à la fois
Nous donne l’amour.

            Chantons, amis,
            Chantons, le jour,
            Chantons la vie,
            Chantons l’amour.