par Alain Guilbert
Le match de hockey féminin pour la médaille d’or disputé aujourd’hui à Sotchi passera sûrement à l’histoire comme l’un des plus extraordinaires de tous les temps… hockey masculin et féminin confondu.
Il restait à peine trois minutes à jouer et les Canadiennes tiraient de l’arrière par deux buts (2 à 0). Le match était à toutes fins utiles terminé et la médaille d’or partie à destination des États-Unis. Mais comme disait le célèbre Yogi Berra à l’époque, « It’s not over till it’s over! » On avait bien ri quand il avait prononcé la phrase qui l’a rendu célèbre, mais c’était pourtant la pure vérité. Les Canadiennes comptent finalement leur premier but. Elles tirent alors de l’arrière par un seul but avec un peu plus de trois minutes à jouer. L’espoir renaît et avec une minute à jouer, Marie-Philip Poulin égalise les chances 2 à 2. C’est l’euphorie à Sotchi, mais aussi dans des millions de « chaumières » canadiennes. L’incroyable vient de se produire. Nos joueuses viennent de réussir l’un des plus grands retours de l’histoire. Les Américaines sont assommées, je dirais même « abasourdies ». Le match s’en va en période supplémentaire et l’incroyable se produit encore une fois. Marie-Philip Poulin compte un autre but qui « nous » donne la médaille d’or. Incroyable… tout simplement incroyable. Nous ne le répéterons jamais assez.
Cette Marie-Philip Poulin, pour ceux et celles qui ont le moindrement de mémoire, avait accompli le même exploit de compter deux buts lors du match de médaille d’or (remportée aussi par les Canadiennes) aux Jeux de Vancouver. C’est la quatrième médaille d’or de suite pour les Canadiennes; elles l’ont obtenue à Salt Lake City (2002), à Turin (2006), à Vancouver (2010) et aujourd’hui à Sotchi (2014).
Trois des joueuses de l’équipe canadienne en étaient aussi à leur quatrième médaille olympique en hockey. Il s’agit (comme vous le savez sans doute) d’Hayley Wickenheiser, de Caroline Ouellette et de Jayna Hefford.
Combien d’athlètes ont gagné des médailles d’or à quatre Jeux olympiques consécutifs différents? Très, très peu. On peut probablement les compter sur les doigts de la main. Je me souviens d’Al Oerter, un Américain spécialisé dans le lancer du disque, qui a réussi l’exploit en 1956 à Melbourne, en 1960 à Rome, en 1964 à Tokyo et en 1968 à Mexico. Il y a eu aussi Carl Lewis qui a aussi réussi l’exploit en saut en longueur à Los Angeles en 1984, Séoul en 1988, Barcelone en 1992 et Atlanta en 1996. Il existe des athlètes qui ont gagné bien plus de médailles d’or au total parce qu’ils pratiquaient des disciplines où ils pouvaient gagner jusqu’à six ou sept médailles d’or dans les mêmes Jeux (comme la natation, le patinage de vitesse). Mais au hockey (comme au lancer du disque et du saut en longueur), il n’y a qu’une seule médaille d’or par Jeux olympiques; ce qui ajoute encore beaucoup de valeur à cette incroyable (je sais que je me répète) équipe féminine de hockey et à ses « vétérantes »!
Reste à souhaiter que la performance de « nos filles » au hockey inspire « nos gars » à répéter l’exploit!
Il faut également accorder beaucoup d’importance à l’autre extraordinaire médaille d’or remportée aujourd’hui au curling par Jennifer Jones et son quatuor. Jennifer Jones a réussi un exploit sans précédent au curling féminin, en gagnant tous les matches sans exception disputés dans le cadre du tournoi olympique (préliminaires, demi-finale et finale). C’est la première fois qu’une équipe féminine réussit un tel parcours « sans faute » depuis l’introduction de ce sport aux Jeux olympiques (qu’il ait été sport officiel ou sport de démonstration). Sans la « skip » Jennifer Jones, le Canada aurait probablement été éliminé il y a bien longtemps. C’est elle qui a porté son équipe au bout de ses bras (ou plutôt de son bras)! C’était un moment attendu depuis fort longtemps. La dernière fois que le Canada avait remporté une médaille d’or en curling féminin remonte aux Jeux de Nagano en 1998, soit il y a 16 ans. L’équipe canadienne de l’époque était dirigée par la très grande Sandra Schmirler, qui s’était emparée de l’or olympique après avoir remporté deux championnats du monde. Son exploit lui avait valu à elle et son quatuor d’être choisi l’équipe de l’année au Canada en 1998 par la Presse canadienne. Schmirler s’était attiré l’admiration de tous les Canadiens à la suite de son exploit. Mais elle devait décéder deux années plus tard, soit le 2 mars 2000, à la suite d’un cancer très agressif. Elle n’avait que 36 ans, mais elle est passée à l’histoire comme l’une des plus grandes athlètes canadiennes de tous les temps. Sans aucun doute, Jennifer Jones, qui comptait déjà un championnat canadien et un championnat du monde avant sa médaille d’or d’aujourd’hui, rejoindra Schmirler comme l’une des plus grandes du sport canadien.
En passant, pour ceux et celles qui auraient tendance à croire que le curling n’est pas un vrai sport, je vous invite à disputer un ou deux matches pour votre plaisir. Si vous réussissez à placer une pierre dans la « maison » ou si vous réussissez à faire dévier la trajectoire d’une pierre en balayant la glace devant la pierre, faites-le-moi savoir. Je ne m’attends pas à recevoir beaucoup d’appels! Incidemment, le curling n’a pas toujours eu la vie facile comme discipline olympique. Il est apparu aux premiers Jeux d’hiver de l’histoire en 1924 à Chamonix, avant de subir une longue éclipse jusqu’en 1932, puis il est encore une fois disparu du programme. Il est revenu comme sport de démonstration en 1988 à Calgary et en 1992 à Albertville. Ce n’est qu’en 2006 à Turin qu’il est redevenu un sport officiel. Parions qu’il le restera encore longtemps.
En bref…
– En faisant le bilan des médailles décernées jusqu’à maintenant aux Jeux de Sotchi, je constate qu’il en manque au moins deux et, ce qui est plus grave, c’est qu’il s’agit de deux médailles d’or, celles qui auraient dû être décernées à Vladimir Poutine et à Marcel Aubut pour leur performance respective « en culture de leur image de soi »!
– Qu’est-ce qui va le plus vite aux Jeux olympiques d’hiver. L’équipe de Radio-Canada a réalisé cette recherche et en est arrivée aux résultats suivants : en patinage de vitesse, longue piste, on peut obtenir des vitesses tout près de 50 km/heure et ainsi de suite en passant par de nombreux sports jusqu’au ski alpin (épreuve de descente) où on peut atteindre plus de 160 km/heure. Mais il y a quelque chose de plus vite encore. Non, ce ne sont pas des athlètes qui atteignent cette vitesse supérieure à 180 km/heure, mais les rondelles projetées par lancers frappés au hockey sur glace. Je présume qu’on a mesuré le lancer de Shea Weber!
– J’ai mentionné à quelques reprises que les joueurs canadiens (et cela vaut aussi pour les joueurs américains) avaient de la difficulté à s’adapter à la dimension des patinoires européennes par rapport aux patinoires nord-américaines. Quelqu’un m’a demandé quelle était la différence entre les deux. Alors voici : les dimensions des patinoires nord-américaines sont généralement de 200 pieds de longueur par 85 pieds de largeur (soit 17 000 pieds carrés). Les dimensions des patinoires européennes mesurent généralement 210 pieds en longueur et 98 pieds en largeur (soit 20 580 pieds carrés), une différence énorme de 21 %. Une autre différence, moindre celle-là, se situe au niveau de la ligne des buts qui est à 11 pieds de la bande en Amérique du Nord et à 13 pieds de la bande en Europe. Résultat net de ces différences, c’est que les joueurs canadiens et américains ont de la difficulté à pratiquer le jeu d’accrochage qui est à la base de leurs succès dans la Ligue nationale.
À la prochaine…