par Alain Guilbert
Depuis le milieu des années 60, j’ai certainement vu plus d’une vingtaine de cérémonies d’ouvertures des Jeux olympiques (Jeux d’été et Jeux d’hiver)… La cérémonie d’aujourd’hui à Sotchi est probablement la plus extraordinaire et la plus sensationnelle que j’aie vue. Bien sûr, les technologies modernes permettent des trucs qui auraient été impensables il y 10 ou 15 ans. Mais raconter l’histoire de la Russie en à peine une heure, moyens technologiques ou pas, relève presque de l’impossible. Mais les Russes ont réussi de façon spectaculaire.
Je suis convaincu que vous vous rappellerez encore cette cérémonie dans 10 ans, dans 20 ans même (pour les plus jeunes de mes lecteurs).
J’espère que vous avez regardé cette cérémonie sur le réseau anglais de CBC plutôt que sur le réseau français de Radio-Canada. Les commentateurs du réseau français, Patrice Roy et Marie-Josée Turcotte, ont été d’une banalité incroyable. Je me suis promené durant les trois heures de la cérémonie entre CBC et Radio-Canada. Chaque fois que je me suis retrouvé au réseau français, j’ai failli bailler d’ennui. Les deux animateurs n’avaient sûrement pas fait leurs devoirs. Nous savons tous que le scénario de la cérémonie d’ouverture (tout comme celui de la clôture) est un secret bien gardé… jusqu’au matin de l’ouverture. C’est à ce moment que le Comité organisateur remet (sous embargo) le scénario détaillé de l’événement afin que les commentateurs (en particulier) et les journalistes aient le temps de se familiariser avec tout ce qui va se dérouler sous leurs yeux.
Je me souviens qu’aux Jeux de Montréal, les commentateurs du réseau américain ABC s’étaient retrouvés à mon bureau moins de cinq minutes après avoir reçu le scénario. Ils voulaient poser des questions sur tous les éléments du programme pour bien le comprendre chaque détail, chaque mouvement. J’ai convoqué un responsable de la cérémonie d’ouverture et je l’ai remis entre les mains du réseau ABC. L’entrevue a duré trois heures… oui, trois heures… mais à la fin, les commentateurs américains connaissaient tous les détails et tous les concepts du programme. Leur couverture de l’événement avait été impeccable.
Par contre, je n’en reviens pas encore de la performance de Radio-Canada plus tôt aujourd’hui. Patrice Roy, un spécialiste de l’information politique (et non pas de l’information sportive) a confondu l’équipe chinoise avec celle d’un tout petit pays lors du défilé des athlètes dans le stade. Je l’ai entendu dire que « les Chinois n’avaient pas beaucoup de leurs athlètes dans le défilé »… bien sûr, ce n’était pas l’équipe chinoise. Quand la cérémonie d’ouverture a rappelé les extraordinaires réalisations de Pierre Le Grand (et ensuite de la Grande Catherine), Patrice Roy a parlé de l’époque des « empereurs de Russie »… Seul petit détail : il n’y avait pas d’empereurs en Russie… mais bien des tsars (et des tsarines).
Les pauses publicitaires du réseau français se sont souvent produites à de bien mauvais moments. Le réalisateur lui-même ne devait pas vraiment avoir lu le scénario détaillé seconde par seconde. Je n’ai vu aucune de ces gaffes au réseau anglais. Dommage si vous avez raté cette version… mais heureusement, la cérémonie était quand même extraordinaire malgré ces « manques flagrants » du réseau français.
Dans un contexte différent, j’espère que vous avez bien compris ce que représentait la médaille d’or au hockey sur glace pour les Russes. C’est la médaille la plus importante… et de loin. Lors de l’entrée de la flamme olympique dans le stade, on a fait appel à de nombreux « très grands athlètes russes » tant des Jeux d’été que des Jeux d’hiver, mais quand est venu l’étape finale d’allumer la grande vasque du stade où la flamme brillera jusqu’à la fin de la cérémonie de clôture, vous avez sûrement retenu le nom de l’athlète qui l’avait entre les mains. Mais oui, c’était le très grand Vladislav Tretiak, le célèbre gardien de but qui a remporté trois médailles d’or olympiques avec l’équipe « soviétique ». Pour les Russes, la plus importante médaille des Jeux, c’est celle du hockey. Sûrement une coïncidence, c’est aussi la plus importante médaille des Jeux pour le Canada. Même si le Canada terminait premier, au total, des médailles, mais ne remportait pas la médaille d’or au hockey, ou pire, encore, pas de médaille du tout, cela serait considéré comme un échec. Je rêve d’une finale Russie-Canada au tournoi olympique de Sotchi; ce match serait sans doute aussi intense que celui disputé en 1980 à Lake Placid entre l’Union soviétique et les États-Unis, une équipe qui ne comptait aucune vedette dans ses rangs. À la surprise générale, le match avait été remporté par les Américains, ce qui avait par la suite était qualifié de plus grand exploit sportif du XXe siècle par le célèbre magazine Sports Illustrated. Un match Canada-Russie pour la médaille d’or pourrait éventuellement devenir le plus grand exploit sportif du XXIe siècle… du moins pour le pays gagnant! Les plus importants sports aux Jeux olympiques d’hiver sont le hockey sur glace, le ski alpin, le ski de fond, le patinage de vitesse longue piste et le patinage artistique. Le reste, que vous aimiez cela ou pas, ne constitue que de « l’entertainment ». Je sais que je perdrai quelques amis en écrivant cela, mais c’est quand même la vérité.
Petite note que j’aurais dû vous mentionner avant aujourd’hui… puisque le fait a été souligné sur tous les réseaux de télévision lors de la cérémonie d’ouverture. Thomas Back, le président du Comité international olympique (CIO), a participé comme athlète aux Jeux olympiques de Montréal en 1976. Il y a remporté la médaille d’or lors de la compétition de fleuret (l’une des épreuves de l’escrime) par équipe. Peu d’entre vous l’ont vu à l’œuvre au centre sportif de l’Université de Montréal où avaient lieu toutes les épreuves d’escrime. J’ai eu le privilège d’y aller, mais je ne pourrais vous dire si j’ai vu Thomas Back à l’œuvre; si je vous affirmais que oui, ce serait probablement un mensonge!
Tôt demain matin (peut-être même ce soir pour ceux et celles qui veilleront jusqu’après minuit – alors qu’il sera 9 heures du matin à Sotchi), la récolte de médailles du Canada commence. Ce sera d’abord dans la finale de ski (planche à neige) « slopestyle » chez les gars – à surveiller Maxime Parrot et Sébastien Toutant (que les admirateurs des X-Games ont baptisé Sebs Touts); ainsi qu’en ski acrobatique (bosses) chez les filles – à surveiller les trois sœurs Dufour-Lapointe : une sur le podium, sûrement… deux sur le podium, peut-être… trois sur le podium, le rêve impossible!
À la prochaine…