À l’époque, les délinquants se retrouvaient dans des « écoles de réforme » même si ce nom n’était plus utilisé. Mais c’était du pareil au même. Voilà donc que l’Association canadienne-française de l’Ontario, par la voix de son animateur Jean Malavoy, « veut que l’on fasse le jour sur les services offerts aux francophones de l’Ontario au niveau de la délinquance juvénile, particulièrement en se basant sur la situation de l’école Champlain d’Alfred, fondée le 6 août 1933 ». Il en est longuement question à la une de l’édition du 21 juin 1978 du journal Le Carillon. L’ACFO, tant régionale que provinciale, avait préparé un document intitulé « Recherche sur la dimension linguistique et la dimension économique de l’école Champlain d’Alfred » et destiné à l’ombudsman de l’Ontario, Arthur Maloney, et au sous-ministre des Services sociaux et communautaires de l’Ontario, G.R. Thompson.
« La recherche démontre trois dates clés qui ont marqué l’histoire de l’école Champlain. De 1933 à 1965, l’école est gérée par les Frères des écoles chrétiennes. En 1965, la Direction des services correctionnels prend la responsabilité de l’école, mais cette dernière demeure propriété des FEC et garde le statut d’école privée. Le 14 janvier 1974, l’école devient la propriété du gouvernement ontarien et relève du ministre des Service correctionnels. C’est là qu’elle devient l’école Champlain. Le 1er juillet 1977, l’école Champlain devient dépendante du ministère des Services sociaux et communautaires de l’Ontario. » Et elle le restera jusqu’à sa fermeture.
« Lorsqu’on se penche sur la situation linguistique de l’école Champlain, lit-on dans le document, un premier paradoxe vous frappe d’emblée : 95 % du personnel est francophone et 75 % des jeunes délinquants sont anglophones. La population délinquante de l’école a été majoritairement anglophone dès 1940. (…) À l’école Champlain, les jeunes étant en majorité anglophones, le personnel travaille en anglais; les ordres sont donnés en anglais. Par contre, lors d’un contact individuel avec un jeune délinquant francophone, un employé ‘pourra s’exprimer en français’. (…) L’ACFO se demande ‘comment se fait-il que de jeunes délinquants francophones, traités par un personnel presque exclusivement francophone et entourés par un village strictement francophone, soient en voie d’assimilation’. L’ACFO estime que l’influence quotidienne de la majorité des étudiants, unilingues anglophones, est sans doute une raison majeure. ‘Le fait que l’institution, par son statut même, soit une unité de vie fermée à presque toute influence extérieure, dont la population francophone avoisinante, est un élément déterminant’ affirme le document. » La position de l’ACFO n’avait pas soulevé de débat.
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Gérald Leroux est un jeune hockeyeur de St-Bernardin qui évolue avec les Spitfires de Windsor dans la Ligue junior majeure de l’Ontario, la même ligue des 67’s d’Ottawa l’équipe pour laquelle joue Yvan « Puce » Joly de Hawkesbury (j’en ai parlé précédemment). Comme le rapporte le journaliste sportif Yvon Legault dans le journal du 21 juin 1978, Leroux ne sait plus où donner de la tête. Il a été ignoré par toutes les équipes lors du récent repêchage de la Ligue nationale de hockey où 234 jeunes joueurs comme lui avaient pourtant été sélectionnés. « Ma taille m’a certainement nui énormément. Les équipes de la Ligue nationale ont regardé mes cinq pieds et six pouces et elles ont complètement ignoré les 124 points que j’ai récoltés la saison dernière. Je n’aurais probablement par été sélectionné même si j’avais récolté 25 points de plus, a insisté celui qui a terminé au sixième rang des meilleurs marqueurs de la Ligue junior majeure de l’Ontario. » Leroux avait également négligé de retenir les services d’un agent, comme il l’avait reconnu.