Ce n’était pas mon choix

En politique, on ne sait jamais. Par exemple, je ne sais pas si les rumeurs d’une défaite certaine des progressistes-conservateurs au scrutin de 1993 avaient été la source de la décision de préparer la succession et la retraite du président-directeur général Donald Lander en cette fin d’année 1992.

Le 10 décembre 1992, je suis convoqué au 9e étage de l’édifice Sir-Alexander-Campbell pour une rencontre d’information secrète, comme cela se produira souvent pendant ma carrière à Postes Canada. C’était la nature de mon travail. Je devais préparer un communiqué de presse pour le bureau du ministre Harvie Andre pour annoncer la grande nouvelle. Disons que ce n’est pas dans le bureau de Georges C. Clermont que j’aurais souhaité être convoqué, mais plutôt dans celui de l’autre vice-président de groupe, William Kennedy, ma préférence pour succéder à Lander. Mais voilà, ce n’était pas moi qui choisissais.

Clermont allait être nommé chef de l’exploitation, le même titre que Lander avait hérité lors de son embauche à Postes Canada en 1984 et avant qu’il ne devienne président-directeur général en 1986, l’année avant mon arrivée dans l’entreprise. La transition prévoyait que Lander demeurait PDG et, l’année suivante, il confierait la direction à Clermont puis occuperait la présidence du conseil d’administration. Lander prendrait officiellement sa retraite en 1994, exactement 10 ans après son arrivée à la société d’État.

Même si ce n’était pas mon préféré, Clermont avait quand même une feuille de route intéressante. Nos chemins s’étaient croisés 10 ans auparavant. De 1979 à 1982, il avait été vice-président des affaires diversifiées à la Compagnie internationale de papier du Canada et c’est lui qui avait été délégué à Hawkesbury pour annoncer la fermeture de l’usine locale de la CIP. Peut-être que cette situation avait biaisé mon jugement.

Avant la CIP, il avait pratiqué le droit de 1962 à 1968 chez Duranleau Dupré et Stewart McKenna, à Montréal, avant de passer chez Bell Canada jusqu’en 1975. Après la CIP, il avait été embauché comme vice-président Affaires générales et juridiques à Postes Canada en 1982; en 1989, il était devenu vice-président de groupe. Clermont était un peintre (huile et pastel) du dimanche et un cultivateur de bovins Simmental dans sa ferme de Dunrobin. Lui et sa femme Marie avaient trois enfants (Georges R., Anne-Marie et Jean-François).

Mais Clermont n’était pas le plus grand fervent de son équipe de communications, associée beaucoup à Bill Kennedy à son goût. En fait, à un certain moment, lors d’un rassemblement au Château Laurier, il nous dira clairement que nous étions un groupe d’incompétents. Très motivant, il va sans dire. Je crois que je l’ai encore sur le cœur; j’ajoute que j’étais encore à Postes Canada bien après son départ.

Et tout cela se passait alors que dans le Bas-Saint-Laurent, six jours auparavant, tout près de L’Isle-Verte dont on attend parler ces temps-ci dans tous les médias, une guerre contre Postes Canada avait été déclenchée dans la petite communauté de Saint-Clément.

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