Postes Canada, une société d’État à mandat commercial depuis 1981, avait adopté toutes sortes de mesures afin de se débarrasser des méthodes du passé lorsqu’elle était un ministère fédéral, y compris, en 1986, l’idée de remplacer des bureaux de poste par des comptoirs en entreprise privée. Je vous en ai fait un résumé avant Noël. La société avait même convaincu le Conseil des relations du travail (CRT) de regrouper ses trop nombreux syndicats, surtout les postiers et les facteurs. Ce qui fut fait en 1989.
En fait, le CRT avait décrété la tenue d’un vote afin de laisser aux employés le choix de ce qui serait leur nouveau syndicat : le Syndicat des postiers du Canada (travailleurs internes) et l’Union des facteurs du Canada (travailleurs externes). Le premier a remporté la confiance de la majorité des travailleurs et deviendrait ainsi le seul agent négociateur avec l’employeur pour ces deux groupes d’employés, les plus importants parmi tout le personnel de l’entreprise. Je me souviens d’avoir rédigé un communiqué interne pour annoncer cette nouvelle alors que j’étais aux communications avec les employés. En fait, j’étais retourné à Hawkesbury, où je résidais toujours, à 5 h 30 le matin… une petite journée de 23 heures sans interruption… le jour même où mon nouveau directeur (Antoine Normand) commençait. Il m’avait téléphoné pour se rassurer que je n’avais aucune intention de retourner au travail ce jour-là.
L’année suivante (1990), je passe au groupe des relations avec les médias, sous la direction de Jack Van Dusen (un ancien journaliste et membre de cette famille de communicateurs de père en fils et de frères/sœurs en neveux/nièces que sont les Van Dusen à Ottawa). Jack était venu me recruter sans passer par les canaux habituels des ressources humaines, ce qui lui a valu quelques problèmes. Entre temps, il faudra quasiment une année à Antoine pour qu’il me parle de nouveau. La politique de bureau n’est pas toujours de tout repos.
Comme je disais, le nouveau syndicat n’allait pas se faire tasser dans un coin du jour au lendemain. Au contraire. Le Syndicat des postiers du Canada, ne l’oubliez pas, avait été, en 1981, le premier syndicat canadien à obtenir le congé de maternité pour ses membres. Ce n’est qu’un exemple de ses gains. À l’époque, la poste constituait un véritable monopole des communications imprimées ou écrites; l’électronique n’existait pas encore et le télécopieur s’installerait vers la même époque. Les syndiqués savaient très bien qu’ils pouvaient paralyser tout un système et obtenir tous les gains ouvriers qu’ils souhaitaient.
Les premières négociations de 1991, qui suivaient ce regroupement, allaient nécessairement être ardues et complexes. L’employeur le savait. Le syndicat aussi. Retenez que son slogan était et est encore : « La lutte continue », ce qui laisse supposer, bien sûr, qu’il n’y a pas de fin en perspective.
Ces négociations se poursuivent depuis de longs mois quand au début d’août, pendant mes vacances, je reçois un appel de mon directeur Jack : « Tu t’en vas au Château. Fais tes valises. » Deux collègues porte-parole, Ida Irwin et Deborah Saucier, y sont déjà, de même qu’une agente de soutien, Lynn Hewett. Nous y passerons les trois prochains mois, 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Nous, des relations avec les médias, et toute l’équipe des relations du travail.