Feuilleton sur une époque longtemps disparue (5)

À travers les clôtures

Mais la plupart du temps, les paysans admiraient de loin. M. Earl Butler, dont la résidence est construite sur la fondation de l’édifice abritant les bouilloires du Grand Hôtel, relate les longues heures passées à admirer le défilé des vacanciers descendent de gare dans leurs costumes à la dernière mode, se dandinant élégamment vers leur chambre en empruntant un des trottoirs de l’imposant réseau.

Le soir, une fois leurs travaux des champs terminés, les habitants de la région se prenaient à rêver à la vue des locataires du Grand Hôtel se promenant bras dessus-dessous ou naviguant paisiblement sur l’étang artificiel créé grâce à un barrage empêchant un petit ruisseau de se tarir.

M. Butler conserve des souvenirs assez flous de Caledonia Springs à son époque glorieuse cependant. Il n’était pas encore en âge d’aller à l’école lorsque le Grand Hôtel cessa ses opérations. Un de ses frères aînés, Cecil, a agi en tant que caddie au terrain de golf, un autre plus âgé a travaillé comme garçon de chambres, premier emploi qui s’est d’ailleurs avéré le début d’une longue carrière dans l’hôtellerie au service de la compagnie CPR.

Pendant l’année de fermeture, M. Butler raconte qu’il s’est sournoisement introduit dans le Grand Hôtel abandonné à quelques reprises. Il en garde le souvenir d’un établissement incroyablement vaste, aux larges corridors et d’une beauté et d’un raffinement rares. Ce ne sont que les souvenirs d’un enfant âgé de 6 ou 7 ans mais qui confirment les commentaires de documents historiques au sujet de cet hôtel de 300 chambres.

En 1914, le Grand Hôtel fut démoli. Les travaux furent si rapides que personne ne semble en garder mémoire. Avec lui, Caledonia Springs s’éteignit lentement. Lorsque M. Ubald Leduc se porta acquéreur de la propriété en 1943, raconte son fils Reynald, il ne subsistait pratiquement que les anciens bâtiments de la ferme grâce à laquelle la direction de l’hôtel subvenait autrefois à l’alimentation des locataires.

La surtaxe exigée par les gouvernements sur les bâtiments, et le contexte économique mauvais incitèrent M. Leduc à démolir la plupart des bâtiments toujours debout.

« Plusieurs constructions étaient encore debout et solides, raconte M. Reynald Leduc, dont le terrain est une parcelle de l’ancienne propriété du CPR. Toutefois c’était pendant la guerre et nous ne pouvions nous permettre de payer des taxes sur des bâtiments dont nous n’avions pas besoin. C’était une question de subsistance. Nous avons donc démoli et vendu le bois, qui était d’ailleurs abondant et de bonne qualité. »

Demain : L’Adanac Inn et les Rutherford

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