Feuilleton sur une époque longtemps disparue (7)

Qui a fermé le Grand Hôtel?

Toutes les recherches effectuées jusqu’à maintenant, et même les livres d’histoire omettent de mentionner la raison exacte de la fermeture du Grand Hôtel, à Caledonia Springs, événement qui a marqué le début de la fin de l’heure de gloire du site de villégiature jusqu’alors tellement populaire.

De plus, le Canadian Pacific qui était propriétaire de l’établissement à cette époque n’a ouvert d’archives qu’en 1973, selon la recherche effectuée pour les comtés unis en 1981.

Le CP a annoncé officiellement la fermeture de l’établissement principal de Caledonia Springs en 1915, et a démoli l’installation au cours des années suivantes. Des témoins disent que la fermeture avait eu lieu en 1914, et les recherches font état de travaux onéreux incomplets effectués à l’automne de 1913.

Le rapport de l’ingénieur sur ces travaux adressé au CP en janvier 1914, insiste sur la nécessité pour la compagnie de s’assurer de la rentabilité de l’embouteillage de l’eau des sources avant d’aller de l’avant avec les prochaines étapes. Durant l’année, une distance de cinq mille de longueur de tuyaux avait été installée sous la terre pour acheminer l’eau à l’usine d’embouteillage. L’ingénieur y signale un début de quelque 27 gallons à la minute ou 14 200 000 gallons à l’année. L’embouteillage avec les méthodes les plus modernes nécessitait une dépense additionnelle de quelque 35 000 $, et le projet de 1913 avait déjà coûté à l’époque 30 000 $.

D’autre part, le premier conflit mondial était déclaré en juin 1914. Les pays alliés se sont joints à ceux impliqués dans cette guerre en mai 1915, ce qui pourrait avoir influencé l’ordre des priorités à la compagnie de chemins de fer canadienne. Les recherches ont aussi révélé que le bois des bâtisses démolies avait été récupéré et transporté ailleurs.

La prohibition

Autre hypothèse intéressante : la prohibition. Entre 1914 et 1916, quelque 502 des 835 municipalités de l’Ontario ont soumis au vote populaire la question de la prohibition. Caledonia aurait à cette époque emboîté le pas vers la restriction de toute vente de boissons alcoolisées dans ses limites, puisqu’en 1978, lors des élections municipales, la population devait se prononcer à nouveau sur la question de légaliser la vente d’alcool dans la municipalité. La population a voté à 93 % en faveur de la législation, ce qui donnait le feu vert au bar du nouveau centre communautaire, ainsi qu’à tout établissement éventuel et conforme aux règlements provinciaux. L’une des dernières municipalités à le faire, après 64 ans, Caledonia n’était plus sèche.

Selon l’historien Joseph Shull, dans son livre « Ontario since 1867 », le débat était poussé principalement par la population rurale, les femmes, le clergé et le parti libéral à l’opposition. On présentait alors la question comme suit aux masses : « Chrétienté versus alcool ».

La prohibition a eu pour effet de centraliser les débits de boisson dans les grands centres urbains, et pour l’Est de l’Ontario, dans la province de Québec. La taxe et le contrôle de la province sur les permis et la qualité des produits sont apparus en 1927, tout comme au Nouveau-Brunswick.

La tendance à la contrebande a vite fait son apparition après la prohibition. Cette période marque aussi un changement radical des exploitations commerciales avec l’avènement de la mécanisation dans tous les domaines et des moyens de transport motorisés. Nous étions à peu de temps des « Années folles » et à quelques mois de la Première Guerre mondiale.

Tenir un hôtel ouvert sans alcool aurait été difficilement rentable.

Demain : On y vient encore

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