« Et si la circonscription électorale de Prescott-Russell changeait son fusil d’épaule demain; optait pour autre chose que le parti progressiste-conservateur? Pourquoi pas! » Je commençais mon éditorial du 18 mars 1981 de cette façon parce que Le Carillon, comme à chaque élection municipale, provinciale ou fédérale, faisait valoir son point de vue sur les différents candidats en lice et proposait son choix ou expliquait sa neutralité, le cas échéant. « Depuis trop longtemps, le parti conservateur considère notre région comme un ‘droit acquis’ (…) Un bon député saura de toutes façons à quelles portes il faut frapper. » Je n’avais toujours pas digérer les obstacles systématiques pour empêcher Saputo de s’installer à Hawkesbury et je trouvais qu’il ne s’en faisait pas encore assez en Ontario pour nous reconnaître, les Franco-Ontariens. J’avais donc incité les électeurs à opter pour Don Boudria. « Si vous êtes un lecteur assidu du Journal des débats de l’Assemblée législative de l’Ontario, vous aurez été insulté de voir d’autres députés user de sarcasme envers le vôtre le peu de fois qu’il s’est levé. Même aux réunions des comités, il a été silencieux. C’est beau le travail ‘en coulisse’, mais une minorité a besoin de plus que cela. » Et je concluais que « nous avons un message à transmettre. Nous souhaitons des changements. Nous utiliserons notre droit de vote pour le faire savoir à tout le monde! »
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Le soir des élections, alors que je retournais chez moi à pied, quelques automobilistes m’avaient crié qu’ils avaient suivi mes conseils. Ils n’étaient pas les seuls. « Les libéraux de Prescott-Russell ont savouré tous les instants d’une victoire qui leur échappait depuis 1948, jeudi soir (le 19) à leur quartier général du complexe commercial Hawkesbury Centre à Hawkesbury. » Don Boudria, un conseiller municipal de Cumberland et fonctionnaire fédéral, « a remporté le siège de Prescott-Russell avec une surprenante majorité de 5 240 votes sur le député conservateur sortant J.-Albert Bélanger qui régnait à Queen’s Park depuis 1967 ». Boudria avait récolté 15 142 votes, alors que Bélanger en obtenait 9 902; le néo-démocrate Claude Dion devait se contenter de 1 828 votes. Soixante pour cent de l’électorat s’était prévalu de son droit de vote, comparativement à 55 % à l’échelle de la province. Par contre, Boudria se retrouverait dans l’opposition officielle à Queen’s Park, Bill Davis ayant obtenu 70 sièges comparativement aux 34 des libéraux de Stuart Smith et aux 21 des néo-démocrates de Mike Cassidy. Chez les conservateurs, on ne m’aimait pas trop. L’accès au quartier général de Hawkesbury avait même été interdit aux journalistes. C’était tout dire! Tous les résultats avaient été publiés dans le journal du 21 mars 1981. J’ajoute que Boudria faisait campagne depuis trois années. Ça victoire était évidente avant les élections.
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« La fiesta, c’est fini Plus d’alcool aux comtés unis » peut-on lire comme titre dans le journal du 18 mars 1981. « Insidieusement, jeudi matin, l’ère de la grande sécheresse s’est installée au centre administratif des comtés unis de Prescott-Russell, à L’Orignal. Le stock de boissons alcooliques constitué par les membres pour leur propre usage lors des sessions régulières du Conseil a été déménagé, et il n’est pas question pour l’instant que cette pratique, vieille de 13 ans, recommence à brève échéance. » Après un incident en janvier, « l’administrateur en chef Raymond Ouimet a tout simplement décidé de ne plus s’en mêler ». La réserve avait été constituée parce que les élus, à l’heure du lunch, s’absentaient et revenaient tard pour la session d’après-midi. « Avec un bar ouvert à l’intention des membres, cette pratique a été abandonnée et il était beaucoup plus facile de les garder sur les lieux pour des réunions de comités et pour la session d’après-midi, qui début à 14 heures. » Eh oui, les sessions d’après-midi étaient toujours plus animées!