Aujourd’hui, Stéphane Parisien est directeur général et secrétaire des Comtés unis de Prescott-Russell. Mais à l’époque, il était un élève du secondaire qui avait été lauréat du concours oratoire annuel du club Richelieu de Hawkesbury. Nous avions reproduit son discours dans Le Carillon, mais j’ai oublié de noter la date de parution. C’était sans doute au printemps de 1982. Le voici :
Lorsqu’on entend ces trois petits mots au début d’une phrase, on peut parler avec une certaine assurance que le reste de cette phrase va constituer une exagération de taille, soit dans le sens positif ou dans le sens négatif. Les jeunes d’aujourd’hui…
M. le président, membres du jury,
membres du club Richelieu, chers invités
Les jeunes d’aujourd’hui n’ont pas le sens des responsabilités… Les jeunes d’aujourd’hui ne savent pas ce qu’ils veulent, ils ne veulent pas travailler… ils ne savent même pas travailler. Bien sûr, il y a des exceptions à la règle, mais reste qu’ils ne savent pas écrire le français, ils sont toujours en jeans… Bref, on a plus les jeunes qu’on avait.
Mais « non » diront d’autres; les jeunes d’aujourd’hui s’expriment mieux que leurs parents, ils sont plus vrais que leurs aînés, ils sont plus débrouillards, ils sont moins matérialistes, en somme, les jeunes d’aujourd’hui sont des « idéalistes ».
D’ailleurs, comme chacun le sait, il n’y a pas plus d’enfants même si de plus en plus de gens vont à l’école jusqu’à l’âge de trente ans. Les vingt-cinq ans de Pierrot, les trente ans de nos universitaires doutes et doctorats, le p’tit Latrimouille qui est devenu grand, pendant que Bobino et Bobinette n’ont pas changé depuis quinze ans. OÙ commence et OÙ finit cette jeunesse dont on dit tant de mal, dont on dit tant de bien?
D’ailleurs, pourquoi tant de gens s’acharnent-ils à rester jeunes? Au point où on a défini les quarante ans comme la fleur de l’âge! À quel âge le fruit vient-il donc? Il est curieux, certes, d’entendre certaines personnes dire, du même souffle, qu’ils ont le cœur jeune et que les jeunes n’ont pas de cœur.
Les vieux accusent facilement les jeunes de manquer de jugement, mais les jeunes méprisent les vieux pour leurs préjugés. S’agirait-il d’un conflit de générations? Car il faut dire que les jeunes ont aussi une opinion des vieux. Les vieux sont pourris… ils ne comprennent rien, ils sont tous bourgeois et matérialistes, ils sont insupportables, ils ne pensent qu’à l’argent. Ma mère ne comprend rien et, mon père, il n’est pas « parlable ».
Il faut que jeunesse se passe et que vieillesse se tasse… Où bien encore : « C’était beau dans l’ancien temps! On avait le temps de vivre… »
C’est grâce aux vieux si on est ce qu’on est… D’ailleurs, comme chacun le sait, il n’y a plus de vieux, il y a un troisième âge, un quatrième âge et un âge d’or, même si de plus en plus de gens prennent leur retraite à vingt-cinq ans à travers un chèque de bien-être social ou d’assurance-chômage.
Quand commence-t-on à être vieux? Quand on perd ses cheveux, ses illusions, ou autre chose? Quand on acquiert la sécurité, la tranquillité et le confort? À travers tous ces préjugés, toutes ces incompréhensions, se manifeste beaucoup moins de fantaisie que de travers. C’est l’envie qui pousse les adultes et gens d’âges mûrs à accuser les jeunes. C’est l’impuissance qui amène les jeunes à méprises les adultes. Il ne reste pas moins que grands-parents et petits-enfants s’entendent souvent mieux que parents et enfants. C’est une fantaisie qu’on retrouve presque dans chaque famille. Les parents, les gens de quarante ans et cinquante ans seraient-ils les seuls vrais vieux? Ils seraient donc les seuls jeunes et les jeunes seraient au fond aussi vieux que les vieux avec qui ils s’entendent bien! Si la vieillesse est un retour à l’enfance, le retour « d’âge » retourne vers quoi au juste? La morale de l’histoire ; c’est en vieillissant qu’on comprend les jeunes! C’est en restant jeune qu’on aime les vieux!