Six jours, 17 heures et 53 minutes. Ce n’était pas rien. En fait, c’était un record mondial établi par les employés de l’usine Eastern Steelcasting de la société Ivaco à L’Orignal. Comme on peut le lire dans Le Carillon du 12 octobre 1983, « les employés ont fait fonctionner leurs machines sans arrêt pendant presque sept jours jusqu’à vendredi pour ainsi établir un nouveau record mondial de production consécutive de billettes d’acier ». Le précédent record de « 5 jours, 20 heures et 7 minutes » était détenu par une aciérie japonaise et « avait été établi il y a trois ans » et comme le précisait l’article « ordinairement les machines fonctionnent cinq heures consécutivement ». Les employés avaient été tellement fiers de leur réussite qu’ils s’étaient fait photographier fièrement en équipes et devant leurs hauts-fourneaux. Je ne sais pas si ce record tient encore; avec les nouvelles technologies, j’imagine que non.
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Le centre écologique de la CIP à Harrington était un endroit intéressant pour mieux apprécier ce qu’offre une forêt. C’était aussi, bien entendu, un centre de recherche forestière pour cette société de production de pâtes et papiers. La CIP avait acheté 80 hectares de terres afin d’y aménager un « verger de reproduction », dans lequel « on planterait des épinettes noires et pins gris de qualité supérieure ». Il faudrait évidemment patienter de nombreuses années avant de pouvoir récolter les « cônes de ces arbres en vue de les acheminer vers ses diverses plantations à travers le pays ». Trente ans plus tard, je me demande ce qu’il est advenu de cette nouvelle plantation à Harrington. Il faudra que j’y aille faire un petit tour un beau dimanche d’été.
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Trente ans plus tard, le même message est répété dans des publicités et dans des campagnes diverses. Manifestement, le travail reste toujours énorme pour changer les mentalités. Le ministère de la Santé de l’Ontario et l’Association canadienne pour la santé mentale publiaient cette annonce dans le journal du 19 octobre 1983. Le voici, simplement pour démontrer que l’acceptation des maladies mentales est un message qu’il faut sans cesse répéter :
« ‘Je suis content que mon père ait été malade l’an dernier. Il est chanceux. D’après ce que je peux comprendre, s’il avait été malade il y a vingt ans, il n’aurait peut-être jamais pu revenir à la maison. Je suis content que les choses aient changé. Avant tout, je suis content qu’il soit de retour à la maison avec ceux qu’il aime. Après tout, c’est son chez-soi.’
Les choses ont beaucoup changé ces derniers vingt ans. Les gens acceptent plus en plus en plus le fait qu’une maladie mentale est avant tout… une maladie. Ce n’est pas être possédé du démon. Ce n’est pas un mystère ni une chose inexplicable: c’est une maladie.
Nous avons finalement compris que la santé mentale est quelque chose qu’on ne peut tenir pour acquis. (Un Canadien sur six reçoit de l’aide psychiatrique au cours de sa vie.)
Et ce qui est encore plus important, nous avons compris que les personnes qui recouvrent la santé après avoir souffert de troubles émotifs peuvent redevenir des membres productifs de la société.
Les choses ont changé… et les 4 000 membres de l’Association canadienne pour la santé mentale en Ontario espèrent du fond du cœur que les attitudes face à la santé mentale continueront à évoluer de manière positive. On espère que de plus en plus de Canadiens comprendront le rôle essentiel que jouent les services d’hébergement et les possibilités d’emploi pour ceux qui relèvent des maladies mentales.
Nous croyons qu’avec le temps, le stigmate qui entoure les maladies mentales, fondé surtout sur la peur et l’ignorance, deviendra une chose du passé. »
Voilà. C’était le message d’il y a 30 ans et qui est toujours pertinent. Dans le quotidien La Presse du 14 février dernier, il y avait un long article sur les pertes encourues par les entreprises à cause des maladies mentales, ce qui ne contribue en rien à déculpabiliser ceux et celles qui en souffrent et que ne facilite pas la compréhension par leurs collègues de travail. En fait, je ne me souviens pas de la dernière fois que j’ai lu un article sur les effets néfastes du simple rhume ou de la grippe sur les finances des entreprises pourtant causes fréquentes d’absentéisme.
En passant, les maladies mentales sont la cause de prédilection de mon ancien employeur, la Société canadienne des postes… Postes Canada pour les intimes.