Les Entreprises Plantor Ltée avaient un projet ambitieux pour la région de Plantagenet, soit « un complexe touristique de plus d’un million » de dollars. Le groupe d’entrepreneurs ne craignait manifestement pas les effets néfastes de la nouvelle autoroute 417. Différentes sources laissent entendre que les actionnaires seraient « des hommes d’affaires et des professionnels de la région, dont plusieurs de Plantagenet même ». Ce centre touristique se situerait le long de la route 17 face au parc provincial Nation (il y avait un parc provincial à cette époque), en bordure de la rivière Nation-Sud. Selon Le Carillon du 13 février 1975, « ce centre comprendrait un vaste hôtel du nom d’hôtel Jessop’s Falls et est déjà en construction, ainsi qu’un restaurant et un bar. Un terrain de camping devrait être aménagé ainsi que des pistes de motoneiges; une cabane à sucre apparaîtra également dans le projet. Toujours selon nos sources, une salle de réception serait à la disposition de la clientèle et une piscine intérieure ». Le projet a été partiellement réalisé, mais je doute qu’il s’agissait d’un investissement d’une telle ampleur. À un certain moment, ce motel est devenu le Centre de l’amour… mais pas ce que vous pourriez penser… plutôt un centre religieux charismatique et une maison de retraite.
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« La section de Prescott-Russell de l’Association canadienne-française de l’Ontario craint que la francophonie soit menacée dans le sud du territoire par l’influence de la nouvelle autoroute 417. » Je traite de la question dans mon éditorial du 6 février 1975 du journal Le Carillon. « Décidément, cette nouvelle route sera blâmée et tenue responsable d’à peu près tous les problèmes qui surgiront dans les comtés unis. Pourquoi toujours faire porter le fardeau d’une faute à quelqu’un ou quelque chose d’autre? » Je voulais soulever le point que c’était aux gens de s’occuper de leurs affaires au lieu de toujours attendre que quelqu’un d’autre le fasse à leur place. « L’ACFO estime que la nouvelle route créera des liens entre la population majoritairement anglophone du nord de Stormont et Dundas et celle majoritairement francophone du sud de Prescott et Russell. L’assimilation par les anglophones n’est qu’une question de temps selon l’ACFO et on encourage Toronto à intervenir. Encore Toronto… » J’ajoutais que l’arrivée de la 417, justement, était « une occasion rêvée de revaloriser la culture franco-ontarienne et de la faire connaître aux compatriotes anglophones ». Je notais que le Conseil des comtés unis, très représentatif du territoire avec un membre élu, au moins, de chaque municipalité, aurait sans doute un rôle plus important à jouer. Je parlais dans le vide, comme cela m’est arrivé souvent.
Mais voilà, dès la semaine suivante, je devais apporter un bémol. « Ces jugements avaient été conçus à la lumière de renseignements tout à fait incomplets pigés d’une source qui devrait normalement être fiable. » C’est que l’ACFO avait soumis un mémoire, dont j’ignorais l’existence, et qui reprenait essentiellement la plupart de mes arguments éditoriaux pour contrer cette menace d’assimilation. J’avais donc corrigé le tir et rendu à l’ACFO ce qui lui revenait. L’ACFO, en somme, reprochait aux autorités provinciales d’avoir négligé de consulter la population des comtés unis avant de décider de la 417. Le choix de la population, dans un tel cas, aurait été évident selon l’ACFO… l’élargissement de la 17 à quatre voix.