Postes Canada… j’étais de l’équipage

L’annonce du 11 décembre 2013 de la Société canadienne des postes – Postes Canada pour les intimes – me fournit le prétexte parfait pour commencer un autre volet de mon blogue… celui de mes 23 années dans le groupe des Communications de cette société d’État. J’ai eu le privilège de participer aux grandes innovations du service postal national et d’être témoin de ses débats constants entourant sa survie. Pendant une dizaine d’années, j’ai été porte-parole national de cette organisation et j’en ai fait la promotion, tout en devant trop souvent la défendre.

Postes Canada, c’est un énorme navire dont la navigation n’est pas la plus facile. À l’automne de 1981, le gouvernement canadien donnait le premier grand coup de barre pour redresser son chemin. Pendant les décennies précédentes, Postes Canada se dirigeait vers la dérive; les déficits annuels s’accumulaient et les Canadiens en avaient assez d’éponger des pertes de plus en plus élevées. La transformation du ministère des Postes en société d’État devait être la grande solution. Mais c’était sous-estimer bien des facteurs (pardonner le jeu de mots).

Quand je suis arrivé aux communications avec les employés, au printemps de 1987, la Société canadienne des postes avait déjà fait de grandes manœuvres. Le capitaine de l’époque, le président-directeur général Donald Lander (un ancien leader du secteur manufacturier automobile) avait mis en place un système de contrôle des opérations. Même en 1987, le système postal était encore géré de manière très décentralisée. Chacune des neuf divisions de la Société, par exemple, publiait son propre journal à l’intention des employés et les messages y étaient parfois incohérents. Mes patrons m’avaient embauché justement parce qu’ils avaient le mandat de régler cette situation, de créer un journal national et de faire disparaître les éditions locales.

Lander voulait centraliser les opérations et inculquer une discipline d’efficacité et de responsabilité. Mais voilà, c’était bien beau convaincre la haute direction de la justesse de sa vision, mais à Postes Canada, il fallait composer avec quelque chose de beaucoup plus gros et, à toutes fins utiles, incontrôlable… les syndicats. En 1987, il y avait plusieurs syndicats, dont le puissant syndicat des postiers et le tout aussi puissant syndicat des facteurs. Quand ils ont été fusionnés sous les ordres du Conseil canadien des relations du travail, on espérait mieux… mais cela n’a rien changé sauf que l’employeur négociait avec un syndicat regroupé. Il y avait aussi quelques autres syndicats plus petits.

Au fil des ans, cette énorme vague qu’était le « gros » syndicat continuait à mettre en péril le voyage qu’avait emprunté le navire postal. Car les politiques syndicales, voyez-vous, étaient diamétralement opposées aux visions du capitaine et de ses officiers…, les matelots menaient à leur guise. Ils n’avaient pas le choix, c’était consigné dans leur constitution et leurs politiques. En fait, dans leur manuel révisé en 2011, cette doctrine s’y trouve encore. Pourtant, il y a deux ans, tout observateur voyait bien que les volumes de courrier disparaissaient à un rythme effrayant. Pour vous donner un aperçu, voici un extrait du préambule (les caractères gras sont de moi) :

« Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes se donne l’objectif fondamental de promouvoir et de défendre les intérêts de ses membres contre toute attaque de l’employeur et du gouvernement (agent de l’employeur).

En plus de sa lutte quotidienne pour la reconnaissance et les droits des travailleurs et travailleuses des postes, le STTP s’engage activement à réaliser la transformation de l’ordre socio-économique actuel pour qu’il soit conforme aux intérêts et aux aspirations des travailleurs et travailleuses.

Ainsi, le STTP réprouve toute forme de syndicalisme qui néglige de reconnaître la séparation fondamentale des intérêts du travailleur ou de la travailleuse et de ceux de l’employeur. Le STTP caractérise son orientation comme celle d’un syndicat qui n’admet aucun compromis dans la poursuite des intérêts collectifs de ses membres et qui résiste à toute tentative de la part des employeurs et des gouvernements d’affaiblir ou de détruire le mouvement des travailleuses et travailleurs. »

Et ailleurs dans ces mêmes politiques :

« A-5 Contrôle par les travailleurs et travailleuses

Le syndicat voit comme direction essentielle l’établissement du contrôle par les travailleurs et travailleuses du milieu de travail. Ce principe assure que le syndicat et ses membres cherchent en tout temps à limiter le pouvoir de l’employeur d’organiser nos emplois, les méthodes de production et la planification de notre travail, ou par d’autres moyens de discipliner nos membres. En revanche, le syndicat recherche le plein contrôle par ses membres du travail qu’ils exécutent et du milieu où ils exercent leurs fonctions. »

En fait, lors de l’installation des dirigeants, des permanents syndicaux et des syndics, ceux-ci prennent notamment l’engagement suivant :

« Je défendrai ce Syndicat de mon mieux contre toute tentative de l’employeur en vue de l’affaiblir ou de le détruire et contre toute division, sécession ou maraudage de quelque source que ce soit. (…) Je me comporterai conformément à la fière devise du syndicalisme et de ce Syndicat – Causer du tort à l’un d’entre nous c’est causer du tort à tous. »

Je voulais simplement vous faire comprendre une des raisons pour lesquelles Postes Canada éprouve tant de difficultés et qu’elle doit prendre les mesures drastiques proposées. Ce n’est pas qu’elle n’a pas essayé au fil des ans.

Hier, en passant, j’ai éprouvé de la nostalgie quant à mon ancien rôle de porte-parole. J’écoutais les déclarations de mon ancien employeur et je me revoyais répéter le même message… à un auditoire qui ne semblait pas vouloir comprendre.

C’était une entrée en matière pour vous parler de ma carrière à Postes Canada. J’en aurai énormément à vous raconter au fil des prochaines semaines.

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