C’est dans le journal. Vous êtes coupable!

Encore aujourd’hui, des gens reprochent aux médias de « condamner » d’avance des citoyens qui sont arrêtés et accusés. Dans mon éditorial du 3 avril 1985, je fais référence à une résolution dont avait été saisie le Conseil national des femmes. Une section, le Conseil des femmes d’Ottawa, « qui représente pas moins de 66 organisations féminines de la région de la capitale » voulait « que le Code criminel soit amendé afin de prévoir que le nom ou l’identité d’une personne arrêtée ou accusée d’un délit ne soit pas publié dans aucun journal, magazine, périodique ou média quelconque de quelque façon que ce soit jusqu’à ce que la condamnation soit rendue à moins que la personne accusée consente à la divulgation ou à la publication de son nom ». Cette résolution faisait suite au cas de « Susan Nelles, cette infirmière de l’Hôpital pour enfants de Toronto » qui avait été accusée puis innocentée, mais dont la réputation, entre temps, avait été démolie par la couverture dans les médias nationaux. J’avais argumenté que le souhait du Conseil national des femmes, « tout valable qu’il puisse être, entre pourtant en contradiction avec le principe de notre société ‘juste et démocratique’ qui veut non seulement que justice soit faite, mais qu’on doive la voir faire ». Le cas contraire ouvrirait la voie à des tribunaux secrets « ouverts aux abus les plus crapuleux ». Évidemment, le Code criminel ne serait jamais modifié dans un tel sens. Et en 2013, au Québec, la Commission Charbonneau est un exemple flagrant des effets du moindre soupçon sur la réputation des gens; avant, il y avait eu l’effet Gomery.

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Signe des temps. J’en fais une note dans ma chronique du 3 avril 1985. « Nos lecteurs nous pardonneront quelques erreurs imprévisibles au cours des prochaines semaines. Nous sommes en train de nous adapter progressivement à notre nouveau système de rédaction par ordinateur. Les textes du journal de cette semaine, à quelques rares exceptions, ont tous été conçus grâce à ce petit écran cathodique merveilleux… (si l’on peut en comprendre toutes les complexités). Patience. Nous tenterons par la suite de vous améliorer encore davantage votre journal favori. » L’avènement du traitement de texte pour les journaux et les imprimeries… toute une innovation. La prochaine étape serait l’acquisition d’un Macintosh d’Apple, qui était alors la plus merveilleuse des inventions pour la mise en page graphique. Une petite expression… WYSIWYG… qui reflète l’arrivée de l’informatique dans nos vies de journalistes.

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La publicité du gouvernement fédéral était précisément publiée dans l’édition du 17 avril 1985 du journal Le Carillon et s’intitulait « Date historique pour la reconnaissance des droits à l’égalité ». Le texte se lisait ainsi :

« Le 17 avril 1985, l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés entrera en vigueur. Son libellé est le suivant :

‘15 (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

(2) Le paragraphe (1) n’a pas pour effet d’interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer la situation d’individus ou de groupes défavorisés, notamment du fait de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur couleur, de leur religion, de leur sexe, de leur âge ou de leurs déficiences mentales ou physiques.’

(…) Un comité de sept députés représentant les trois partis de la Chambre des communes étudie actuellement les lois fédérales afin d’en assurer la conformité avec la lettre et l’esprit des garanties d’égalité et de non-discrimination contenues dans la Charte. »

Évidemment, ces clauses auraient une grande portée sur la vie de tous les Canadiens et, en cours de route, créeraient un nouveau concept, celui des accommodements raisonnables… sans oublier la pernicieuse « rectitude politique ».

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