Je le surprends… dans un condo de Floride

J’avais hâte de vous raconter cette histoire. « Le maire Proulx devrait démissionner » est la grande manchette, en lettres blanches sur fond rouge vif, du journal Le Carillon du 1er avril 1976 et ce n’était pas un poisson! Je consacre un texte à la une et deux éditoriaux à cette affaire dont je me souviens encore tellement bien. Toute l’histoire avait commencé après un appel téléphonique d’une source fiable qui m’annonçait que le maire Philibert Proulx passait des vacances en Floride dans le condo de l’ingénieur qui était pressenti pour le futur complexe sportif. Évidemment, il fallait aller au fond des choses. Je communique avec le service d’information téléphonique de Fort Lauderdale et j’obtiens le numéro de téléphone du condo en question, qui était bel et bien au nom de l’ingénieur. Et j’appelle! Mais la voix de la personne qui me répond n’est pas celle que j’attendais… c’était la voix du conseiller Gilles Thériault… et je lui demande, bien innocemment (ou hypocritement, à votre choix), de parler à Philibert; il s’empresse de me le passer. Je lui ai bien sûr demandé de m’expliquer sur-le-champ ce qu’il faisait dans le condo d’un ingénieur pressenti pour un projet de quelques millions de dollars. Je résume la suite dans le journal. Évidemment, je venais de gâcher drôlement leurs vacances.

« Le maire Philibert Proulx et le conseiller municipal Gilles Thériault, accompagnés de leurs épouses, ont passé des vacances en Floride pendant les deux premières semaines de mars. Pendant ces deux semaines, ils pouvaient être rejoints à un certain numéro de téléphone (que Le Carillon connaît et a utilisé) inscrit dans l’annuaire téléphonique de Fort Lauderdale au nom d’un M. Raoul Routhier, à l’adresse 2100 Ocean Lane. Pendant leurs vacances, MM. Proulx et Thériault résidaient à cette adresse, tous deux l’ont reconnu verbalement. Le M. Raoul Routhier en question est un partenaire de la firme d’ingénieurs-conseils Dupuis, Morin, Routhier et Associés, celle qui a déjà tracé des plans pour un complexe sportif à Hawkesbury et celle qui a préparé des esquisses pour la transformation du Centre Mémorial en complexe sportif. » Dans le même article, j’explique qu’un membre du Conseil avait demandé « à ce que le nom de la firme d’ingénieurs-conseils soit éliminé du projet de règlement 3029, d’autant plus que la description des travaux n’était pas rattachée au document ». Il s’agissait du règlement qui aurait autorisé le projet d’un complexe sportif. « Présentement, il n’y a aucun contrat octroyé à quiconque et la décision d’aller de l’avant ou non avec le projet d’un complexe de $2 millions n’a pas encore été prise. » Notons que le ministère du Travail de l’Ontario avait « condamné » en quelque sorte le vieux Centre Mémorial dans une lettre le 29 mars et qu’il avait exigé une certification de sécurité par des ingénieurs, tout au moins. La situation était soudainement très urgente.

Dans un premier éditorial, je fais état de la crédibilité perdue du maire Proulx et j’accorde le bénéfice du doute au conseiller Thériault, qui m’avait assuré que « lui et son épouse étaient les invités du maire Proulx et qu’il ne connaissait pas le propriétaire de l’appartement ». Le maire Proulx se défendait d’avoir payé pour l’appartement et d’en avoir les preuves (que nous n’avons jamais vues). « Sans parler de pot-de-vin, il faut tout de même reconnaître que le maire Philibert Proulx et le conseiller Gilles Thériault se sont placés dans une situation que l’on peut qualifier de ‘conflit d’intérêts’ » et je réclamais la démission immédiate du maire Proulx. Je réclamais également un report de la décision sur le complexe, mais je savais pertinemment que ce n’était pas une solution étant donné que le Centre Mémorial avait été condamné et qu’il fallait assurer les services d’une patinoire aux amateurs sportifs locaux.

Je continue mon histoire lundi…

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